Les avancées scientifiques : méfiez-vous des titres sensationnalistes!

Par intérêt personnel et dans le cadre de mes fonctions à titre de membre du comité de rédaction de Sourdine Express, il va de soi que je surveille attentivement ce qui se publie sur le web, dans les médias spécialisés et dans des groupes Facebook, au sujet de la santé auditive et la recherche scientifique.

C’est encore plus facile depuis qu’Audition Québec s’est doté d’un puissant outil de veille, qui scrute en temps réel ce qui s’écrit sur le sujet.

Deux titres ont capté mon attention récemment, laissant entrevoir des percées scientifiques importantes dans le domaine de l’audition, mais comme ça « sonnait trop beau pour être vrai », j’ai décidé de consulter des spécialistes québécoises pour connaître leur avis.

Le but ici n’est pas d’être pessimiste et d’étouffer l’espoir de retrouver une meilleure audition et de faire taire les acouphènes, mais plutôt d’avoir des attentes réalistes.

La recherche sur les acouphènes

Le premier titre, lu sur le site Trust My Science (un titre de site en anglais, bien que les articles viennent de France et soient écrits en français…) :

Acouphènes : une percée scientifique récente pourrait enfin les faire taire ! 

Je vous laisse le soin de lire l’article, qui est très intéressant. Mais est-ce que ça va donner des résultats bientôt, vraiment?

Mon premier réflexe : retracer l’article (anglophone) qui est à la source de ceci. En “googlant” le nom de la Keck School of Medicine de la University of Southern California, je le retrouve facilement : 

Nerve fibers in the inner ear adjust sound levels and help compensate for hearing loss in mice, study finds. Notez que le titre de l’article anglophone est pas mal moins sensationnaliste que celui en français.

Mon deuxième réflexe, consulter LA spécialiste des acouphènes au Québec, Sylvie Hébert, Ph.D.,  pour connaître son avis. Madame Hébert est professeure titulaire en audiologie à l’École d’orthophonie de l’Université de Montréal et dirige le Laboratoire de recherche sur les acouphènes et l’hyperacousie. Elle a aussi publié le livre Acouphènes : les reconnaître et les oublier.

Je cite la réponse de Madame Hébert : 

« C’est une nouvelle intéressante, qui semble mettre à jour le rôle des fibres auditives descendantes (du tronc vers la cochlée) dans le rôle de l’amplification des sons, à l’aide d’une technique d’imagerie utilisée en ophtalmologie. On savait que dans une perte auditive, il y a une suractivité des structures auditives plus centrales (du tronc au cerveau), ce qui donne lieu à l’acouphène (activité augmentée spontanée) et à l’hyperacousie (activité augmentée lorsqu’il y a du son ambiant) mais ce que cette étude suggère c’est que l’augmentation d’activité vient d’en haut.

C’est une première étape. Je ne dirais pas que « la prochaine étape est de faire des médicaments » , il faut voir si ce phénomène est observable chez l’humain car c’est une étude chez les souris.

 Bref, c’est une belle découverte mais qui doit être corroborée et élaborée. »

La bonne nouvelle, à mon avis, c’est que c’est clair que la recherche avance.

Un implant cochléaire invisible?

Le deuxième titre qui a retenu mon attention est celui-ci : 

Envoy Acclaim : un implant auditif totalement implantable et invisible

Je cite l’article : 

Acclaim est un implant auditif invisible totalement implantable qui fonctionne par stimulation acoustique. Cette avancée intervient en réponse aux limitations des implants cochléaires actuels qui requièrent des composants externes encombrants. Le dispositif Acclaim® d’Envoy Medical élimine ce besoin en intégrant une source d’énergie rechargeable et un capteur dans l’oreille moyenne.

Hum, vraiment? Est-ce une arnaque? Est-ce sérieux? Vite, allons consulter deux ORL expertes en implants cochléaires et alliées d’Audition Québec : Dre Émilie Kay-Rivest et Dre Tamara Mijovic, toutes les deux affiliées au programme d’implant cochléaire du CUSM, le Centre universitaire de santé McGill.

La réponse est courte et unanime : 

Les TICI (totally implantable cochlear implants) sont en effet en développement par plusieurs compagnies. Notamment, Medel a déjà eu quelques cas, mais le tout est encore sous investigation avec plusieurs enjeux à optimiser, notamment la recharge et la qualité sonore du microphone implanté. À mon avis, on est encore à plusieurs années de voir ça sur le marché.

En conclusion, je dirais qu’il faut toujours contre vérifier les informations qui nous parviennent du web en ce qui concerne la santé auditive. C’est simplement une bonne précaution à prendre.

Vous avez des questions sur des articles que vous avez lus? N’hésitez pas à nous écrire à sourdine@auditionquebec.org et nous consulterons les spécialistes appropriés pour y répondre via notre courrier des lecteurs.

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