J’ai ajouté ma voix pour un environnement sonore adapté et le Mile-End a entendu!

Colette Coudé

Ne pas porter attention à la déficience auditive, surdité et malentendance, produit des répercussions sur de nombreux aspects de notre vie quotidienne. Encore plus lorsque les années se sont ajoutées à nos vies. Aujourd’hui, mon propos n’est pas de faire l’étalement de ces nombreuses conséquences sur nous comme personnes aînées, je laisserai aux experts rencontrés à travers ma démarche, le soin de le faire. Je vous en parlerai plus loin. 

Ce qui m’apparaît important de vous partager, par contre, c’est ce qui s’est avéré être le déclencheur d’un projet qui ne m’avait jamais effleuré l’esprit et surtout que je n’aurais jamais cru possible.   Voici donc, très succinctement, comment cette histoire a commencé et, comme le dit Michel Fugain dans sa chanson, « c’est une belle histoire! » 

Lorsqu’au début de septembre 2022 je me suis retrouvée en salle à manger au Mile-End, j’ai réalisé tout à coup que ma déficience auditive venait d’entrer en collision frontale avec tout ce qui pouvait s’entendre! Les voix autour et près de moi, les variations des sons de voix graves et d’autres aigus, certains tons de voix plus directs de conversations parmi d’autres, la vaisselle qui grinche, s’entrechoque… En fait, ce fut l’ensemble de tous les bruits qui enterraient en tout ou en partie les conversations avec mes charmantes voisines de table…

DU BRUIT QUI ME POUSSE VERS L’ISOLEMENT

Après quelques mois je n’en pouvais tout simplement plus et j’ai déserté toutes activités de groupe. Dans ma tête, le soir venu, je réalisais qu’en plus des bruits de l’environnement auxquels j’étais confrontée, les acouphènes musicaux et de sons qui avaient commencé à s’installer quelques mois avant mon arrivée, avaient augmenté leur sonorité d’une manière significative et très dérangeante, surtout…Femme active et qui aime les gens il m’était encore plus difficile d’accepter que ma vie en résidence continue de devenir lentement un frein à « mon vivre ensemble ». 

De fil en aiguille, de recherches en réflexions, lorsque j’ai décidé de plonger dans une démarche avec des professionnels, là où j’ai pu rencontrer d’autres personnes vivant avec des acouphènes, j’ai vraiment décidé que je voulais y faire face. Je venais de prendre toute la mesure de ce retrait dans lequel je tendais à me réfugier sans que je m’en doute.  J’avais pris le chemin que les spécialistes de la déficience auditive et de la surdité appellent l’isolement social

À LA RECHERCHE DE SOLUTIONS

Oui, il existe des personnes bien au fait de ces phénomènes et leurs conséquences sur nous, donc des moyens à notre portée pour comprendre et nous accompagner pour sortir de ce processus d’isolement croissant qui nous guette dans le détour si on n’y prend garde!  Je voulais, je devais freiner l’évolution qu’on me décrivait.

C’est donc en octobre 2023 que je me retrouve au Programme Acouphène, intolérance aux sons et Programme Adultes – Aîné.es, du Centre de Réadaptation Raymond-Dewar – CIUSSS du Centre-Sud de l’Île de Montréal, pour m’intégrer avec deux équipes successives de professionnels. Audiologiste et éducatrice en psychoéducation, dans un premier temps, pour connaître les tenants et aboutissants de mon processus de vie comme malentendante.  Le deuxième groupe est composé de personnes de milieux professionnels différents et vivant avec des acouphènes, où nous sommes accompagnés par psychologue et psychoéducatrice pour « Apprendre à vivre avec ses acouphènes ».

LA NAISSANCE D’UN PROJET PROMETTEUR D’INSONORISATION DE LA SALLE

Arrive fin novembre et, comme dans un livre d’histoire tout à fait vraie, voici le dénouement de cette belle et incroyable aventure qui trouvera son dénouement final prochainement :

  • L’audiologiste de l’Institut me demande s’il pourrait venir étudier le type de salle et l’aménagement que nous avons à la résidence;
  • Je m’informe auprès de Mme Morel, notre directrice, de cette possibilité;
  • Comme elle accepte immédiatement avec enthousiasme, son travail avec l’audiologiste M. Maillot rend possible dans les semaines suivantes la réception d’un rapport détaillé pour l’amélioration acoustique de la salle à manger; 

L’insonorisation consiste à réduire le bruit émis dans notre salle à manger qui sert aussi aux activités communes, dans le but d’améliorer l’intelligibilité de la parole dans la pièce en éliminant le plus possible le glissement du son sur des surfaces inadéquates. Tous les malentendants peuvent entendre les voix, savoir que quelqu’un parle mais sans ou avec des prothèses inadéquates, trop souvent ils ne peuvent pas distinguer les mots. Donc, tout devient du bruit.

Le rapport soumis à notre directrice a proposé diverses possibilités, certaines très simples et à moindre coût qui demandent simplement des changements techniques, tel le positionnement de l’équipement sonore ou encore d’avoir les rideaux qui couvrent la fenestration, d’autres demandant des investissements financiers.

C’est ainsi que se sont enclenchées les étapes successives :  mesures et recherche des matériaux nécessaires, évaluation des coûts, conception du projet devant mener à la recherche de financement, lettres d’appuis que nous fournissent sans hésitation l’audiologiste Michel Maillot du Centre Raymond Dewar et Jeanne Choquette, présidente d’Audition Québec.  Pour Mme Choquette, l’adaptation acoustique d’une  salle commune au bénéfice des personnes aînées vivant avec des déficiences auditives, c’est une première au Québec!

Toujours dans un mouvement de continuité et d’amélioration de nos connaissances pour mieux connaître et comprendre les effets de la déficience auditive sur nos vies, c’est sans aucune hésitation que Mme Choquette a d’ailleurs accepté notre invitation et donné la conférence « Santé auditive; prévention, traitement et stratégies de communication. », le 15 mai dernier, dans le cadre du Mois de l’audition au Québec.

Finalement, j’aimerais exprimer un profond merci à Mme Amélie Morel pour s’être investie spontanément à collaborer avec moi dans ce projet d’amélioration acoustique de la salle à manger au bénéfice des personnes malentendantes au Mile-End. Depuis mars 2024, selon les possibilités de financement annoncées, nous considérons que l’adaptation acoustique de la salle à manger pourra se concrétiser.

INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES

La présidente d’Audition Québec, Jeanne Choquette, a rencontré la directrice de la résidence Le Mile-End, Amélie Morel, qui lui a expliqué les changements acoustiques en cours dans la salle à manger de la résidence :

 

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