Une nouvelle étude suggère que les acouphènes sont liés à des changements synaptiques dans le cerveau

Cet article a été écrit par Karl Strom et a été publié en anglais sur le site de Hearing Tracker le 30 juillet 2025.  Nous vous en présentons une traduction libre ci-dessous.

De nouvelles recherches en imagerie cérébrale révèlent que les acouphènes sont liés à des changements mesurables dans les synapses cérébrales, offrant la première preuve directe de la manière dont cette maladie peut remodeler les réseaux cérébraux avec le temps et la gravité.

Une nouvelle étude d’imagerie pourrait être la première à fournir des preuves in vivo directes que les acouphènes sont associés à des modifications mesurables de la densité synaptique dans plusieurs régions cérébrales, notamment celles impliquées dans le traitement auditif, les émotions et les fonctions cognitives. De plus, ces modifications semblent différer entre les stades aigu et chronique de la maladie.

La recherche, intitulée  « Direct Evidence for Synaptic Density Changes in Tinnitus: ¹⁸F-SynVesT-1 PET Reveals Novel Targets Beyond Metabolic Changes, » est dirigée par JiaYu Zhong et ses collègues de l’Université du Centre-Sud et de l’Université normale du Hunan en Chine.

Augmentation de la densité synaptique dans les acouphènes chroniques

En utilisant un traceur d’imagerie TEP (tomographies par émission de positons) spécialisée appelé  ¹⁸F-SynVesT-1, qui se lie à une protéine des vésicules synaptiques et sert de proxy pour la densité synaptique, les chercheurs ont examiné le cerveau de 28 personnes ayant des acouphènes et de 24 témoins sans acouphène. Les participants ont également subi un TEP scan ¹⁸F-FDG standard, qui mesure l’activité métabolique générale, et ont été évalués par EEG et IRM.

Ils ont constaté que les patients souffrant d’acouphènes chroniques présentaient une captation accrue de ¹⁸F-SynVesT-1, suggérant une densité synaptique élevée, dans 14 régions cérébrales distinctes. Les zones cérébrales impliquées dans le traitement auditif, les émotions et les fonctions cognitives étaient concernées. Une seule région, le gyrus frontal inférieur gauche, présentait une diminution de la captation.

Il est intéressant de noter que ces zones chevauchaient largement les zones de métabolisme élevé observées lors des tomographies par émission de positons (TEP) au ¹⁸F-FDG TEP scan traditionnelle. Cependant, ¹⁸F-SynVesT-1 a révélé un modèle de changements plus large et plus différencié, suggérant que ce type de tomographie par émission de positons (TEP) pourrait être un outil plus sensible pour évaluer la neuroplasticité liée aux acouphènes.

Les acouphènes aigus montrent une tendance opposée

En revanche, les patients souffrant d’acouphènes aigus ont montré une diminution de la densité synaptique dans cinq régions cérébrales. Ces résultats suggèrent un processus de remodelage synaptique bidirectionnel, où le cerveau perd initialement sa connectivité synaptique avant de subir une croissance compensatoire aux stades chroniques.

L’ampleur des modifications synaptiques était également corrélée à la gravité des acouphènes. Les patients présentant des scores élevés au Tinnitus Handicap Inventory (THI) présentaient une densité synaptique plus faible dans les structures limbiques, reliant la détresse émotionnelle à des altérations neurologiques spécifiques.

Réorganisation du réseau et résultats de l’EEG

Outre les résultats du TEP scan, l’analyse des réseaux cérébraux a révélé une connectivité fonctionnelle accrue, notamment pendant la phase aiguë. Cela suggère que le cerveau pourrait réagir aux acouphènes par une réorganisation généralisée, s’adaptant peut-être au bruit interne persistant.

L’analyse des micro-États EEG, utilisée pour évaluer la dynamique des réseaux cérébraux à grande échelle, a montré des altérations conservées chez les patients souffrant d’acouphènes, renforçant l’idée que l’impact neuronal peut être plus répandu dans le cerveau.

Implications pour la recherche et le traitement des acouphènes

Cette nouvelle recherche serait la première étude d’imagerie humaine à fournir des preuves directes et in vivo du remodelage synaptique dans les acouphènes, offrant de nouvelles perspectives sur la façon dont la maladie peut évoluer au fil du temps.

Les différences entre les résultats des cas aigus et chroniques remettent en question la notion d’acouphènes en tant que trouble statique; au contraire, ils soutiennent les modèles émergents qui impliquent une neuroplasticité inadaptée et un rééquilibrage du gain central.

L’utilisation du ¹⁸F-SynVesT-1, un nouveau traceur TEP de plus en plus utilisé dans la recherche sur la maladie d’Alzheimer et l’épilepsie, pourrait également ouvrir la voie à de nouvelles stratégies thérapeutiques ciblant la fonction synaptique plutôt que l’excitabilité neuronale générale ou la perception auditive seule.

Il convient de reconnaître que les traceurs TEP sont une méthode indirecte de mesure de la densité synaptique ; bien qu’ils soient largement utilisés dans la recherche sur la maladie d’Alzheimer et l’épilepsie et fortement corrélés à la densité synaptique dans les études post-mortem et animales, ils ne fournissent pas un décompte direct des synapses (c’est-à-dire, contrairement à un décompte au microscope).

Cette étude apporte un nouvel éclairage sur les acouphènes en tant que problème auditif et neurobiologique

Les nouvelles recherches liées à la TEP pourraient renforcer l’importance de considérer les acouphènes comme une affection neurobiologique caractérisée par des modifications cérébrales évolutives, plutôt que comme un problème purement auditif ou psychologique. En identifiant des biomarqueurs d’imagerie objectifs des modifications de la densité synaptique, l’étude pourrait accélérer le développement de traitements plus ciblés et nous rapprocher de la compréhension des mécanismes cérébraux sous-jacents à cette affection souvent invalidante.

Note de l’éditeur : Cette étude, actuellement disponible sous forme de prépublication, n’a pas encore fait l’objet d’un examen par les pairs et doit être interprétée comme une preuve à un stade précoce nécessitant une validation supplémentaire.

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